Faux souvenirs induits en psychothérapie et fausse mémoire

Les thérapeutes de la "mémoire retrouvée"

Qui sont les thérapeutes des TMR?


Les données générales

Les chiffres que nous indiquons ci-après sont issus des travaux de la MIVILUDES, donnés lors de la conférence sur les faux souvenirs induits à Viuz-en-Sallaz le 29 mai 2009, et lors du Colloque National du GEMPPI à Marseille le 3 octobre 2009.
Le domaine des psychothérapies est encore mal cerné en France

Il existe 50.000 psychothérapeutes connus, exerçant majoritairement en secteur libéral, dont une partie venant des professions de santé : médecins, psychiatres, infirmières, kinésithérapeutes… et le reste de provenances diverses, ne présentant pas toutes les garanties de professionnalisme et de qualité. l'INSEE recense 30.000 psychothérapeutes, la FF2P en dénombre 15.000.

La répartition en est le suivante:
- 20% sont médecins ou psychiatres
- 20% sont psychologues au niveau Master+2
- 20% sont psychanalystes.
- Le reste, soit 40%, se dénomme psychothérapeutes. Ils ont une formation hétéroclite (instituts privés, autodidactes, autoproclamés).

- On compte 4 à 5 millions de clients de la psychothérapie, soit 12 millions de personnes concernées (famille, conjoints, enfants).
- On ne dénombre pas moins de 700 organismes de formation en psychologie et aucun contrôle n'est exercé sur les formations dispensées.


Les dérives sectaires ne sont pas l'apanage des seuls "charlatans"

miviludes small

Elles concernent toutes les catégories de thérapeutes, M. Georges Fenech, Président de la MIVILUDES, a indiqué en 2008 que 3000 médecins avaient été sanctionnés par l'Ordre National des Médecins pour s'être livrés à ce type de pratiques. Le rapport 2007 de la Miviludes en apporte la preuve en indiquant que les psychiatres diplômés sont « interdits d’exercice durant quelques mois par le Conseil de l’Ordre ». Voici la conclusion du chapitre dans le rapport 2007 de la Miviludes (page 167):

"L’observation et l’étude de certains groupes sectaires nous amène à la problématique grave et lourde des faux souvenirs ou souvenirs induits. Ce phénomène dépasse largement le phénomène sectaire puisque l’on observe ce phénomène :
– de la part de psychiatres et de psychologues diplômés ayant des pratiques douteuses et aux théories peu recommandables, hantés par l’expérimentation et fascinés par les abus sexuels ;
– et de la part de psychothérapeutes peu formés ou même sans formation."

L'"idéologie totalitaire" dénoncée par le psychiatre Edouard Zarifian est à l'oeuvre dans toutes les catégories de thérapeutes.
Selon les témoignages que nous avons reçus ici, on trouve parmi les thérapeutes de la mémoire "retrouvée" toutes les catégories notées plus haut, et dans des proportions voisines. Certains d'entre eux sont, bien entendu, des thérapeutes autoproclamés mais aussi des médecins, psychiatres, psychanalystes, psychologues diplômés. Ils interviennent dans des conférences et des séminaires, et même parfois sont experts auprès des tribunaux.


"Une idéologie totalitaire" à l'origine des faux souvenirs "retrouvés" en thérapie.

jardiniers de la folie

Édouard Zarifian est un psychiatre, universitaire et psychothérapeute français. Il a écrit en 1988 un livre: Les jardiniers de la folie qui décrypte la théorie sous-jacente à cette dérive. Cet ouvrage est d'autant plus intéressant que son auteur est proche des milieux de la psychanalyse.
Le public l'a plébiscité et ses ouvrages comme Les Jardiniers de la folie (1988) et Des Paradis plein la tête (1994) et sont devenus des best-sellers. Il donne la priorité à sa pratique clinique et réfute la transposition systématique du champ biologique au champ relationnel. Elisabeth Roudinesco écrit en décembre 2003: "Mon ami Edouard Zarifian a eu en France le courage de dénoncer..." Le samedi 21 février 2009 une journée en hommage à Edouard Zarifian avait été organisée à l'Hôpital St Anne (Paris 14°) sur le thème: "Psychiatrie, psychanalyse, psychothérapies. Quel avenir pour les traitements de l'âme?". Elisabeth Roudinesco a prononcé à cette occasion l'hommage à Edouard Zarifian.

Il écrit dans Les Jardiniers de la folie: (pages 192 et 193)

"A partir de la théorie psychanalytique et de son honnête application sur le divan, une idéologie psychanalytique totalitaire s’est développée. [...] Entendons-nous bien cette vision n’est pas une critique de la théorie psychanalytique ni de ses applications raisonnées. C’est l’exposé d'une idéologie qui s'est nourrie de la psychanalyse et qui l’a caricaturée en allant beaucoup trop loin dans ses généralisations. Si les plus chevronnés des psychanalystes ne sont pas dupes de cette idéologie, ce n'est pas le cas d'un grand nombre d’adorateurs bêlants qui aveuglés, fascinés, propagent avec fanatisme l’idéologie et l’entretiennent aux limites de l'absurde."

Puis page 196: Il poursuit:
"Mais les vraies victimes ce furent comme toujours, les malades et leurs familles. Les patients devaient épouser l’idéologie de leurs soignants. C'est un acte de foi qui leur était demandé. L’idéologie aveugle, appliquée de manière systématique écartait des malades de méthodes thérapeutiques efficaces et renforçait leur pathologie. Les familles étaient particulièrement malmenées. Convaincues de leur lourde responsabilité dans la genèse des troubles de celui qui souffrait, elles étaient tenues à l’écart de toute information au nom de la sacro-sainte relation duelle.
Le couple soignant/soigné devenait l’adversaire acharné de la famille coupable."

Mais les convictions sont parfois tenaces:
Citation d'Elisabeth Roudinesco: "La famille est — nous le savons grâce à la psychanalyse — à l'origine de toutes les formes de pathologies psychiques : psychoses, perversions, névroses, etc.": Pourquoi la psychanalyse ?, Fayard (1999), p. 167).
Jacques Van Rillaer, psychologue et professeur à l"Université de Louvain-la-Neuve, critique ces idées préconçues : "Ainsi, peu importent les facteurs biologiques et économiques, les inégalités sociales, l'exploitation d'hommes par d'autres, ce qu'on voit à l'école ou à la TV… Tout est toujours de la faute de la mère ou du père."

Pour lire des extraits plus complets du livre d'Edouard Zarifian, cliquer ...ici


L'encadrement du titre de psychothérapeute

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L'encadrement du titre de psychothérapeute prévu par la loi s'est heurté à un lobbying très efficace, notamment celui des psychanalystes, qui refusent qu'un niveau minimum de formation universitaire soit requis pour exercer la profession. La loi du 9 Août 2004 qui réglemente la profession de psychothérapeute a enfin son décret d'application, publié le 20 mai 2010.
Pour plus de détails vous pouvez consulter en bas de cette page : L'ANNEXE:
Loi encadrant le titre de psychothérapeute et le décret d'application.

- Les méthodes thérapeutiques sont si nombreuses (de 400 à 500) que le patient a bien du mal à s'y retrouver. Vous trouverez dans notre page les éléments essentiels pour un choix: ...ici
- La formation des psychothérapeutes est peu scientifique, elle est faite "sur une base quasi exclusive de références psychanalytiques" comme l'indique le psychiatre Christophe André. Lire notre page sur ce sujet: ...ici
- Choisir son "psy" est donc une attitude responsable, nous donnons quelques conseils à cet égard dans notre page: ...ici


Le nombre des thérapeutes adeptes des faux souvenirs

L'évaluation du nombre de thérapeutes des TMR est difficile, mais elle peut être faite selon la méthode de calcul de Mark Pendergrast, exposée dans « Victims of Memory », chapitre « The Scope of the Problem ». Pour les Etats-Unis le nombre de thérapeutes officiels recensés par les organismes professionnels était au moment du calcul de 254.600, nombre auquel il faut rajouter les thérapeutes non déclarés. L’étude de Poole, Debra A., D. Stephen Lindsay, a montré que 25% de ces thérapeutes étaient adeptes de la méthode des souvenirs "retrouvés". Soit, en prenant une évaluation minimaliste, il y avait, à la fin des années 90, environ 62 500 thérapeutes des TMR aux Etats-Unis.

Si on transpose ce calcul pour la France on trouverait environ 7 500 thérapeutes des TMR. Ce chiffre peut paraitre élevé, mais il reste crédible compte tenu des indications de M. Fenech citées plus haut et d'un "freudisme" ambiant très développé.
La censure récente du film "Le Mur" de Sophie Robert est révélatrice de l'influence de cette idéologie totalitaire. Mais les familles d'enfants autistes ( 460 000 autistes et 2 000 000 de personnes concernées) sont courageuses et bien décidées à faire reculer cette idéologie d'un autre âge...
Pour les faux souvenirs induits on attend ce sursaut.


Le nombre de patient(e)s victimes des faux souvenirs

Selon l'étude de Mark Pendergrast, chaque thérapeute traite en moyenne 50 patient(e)s par an, et 34% des client(e)s retrouvent en thérapie des souvenirs d’abus dont elles avaient nié l’existence initialement, soit 17 patient(e)s sur 50. On arriverait ainsi, en France, à une épidémie de faux souvenirs "retrouvés" en thérapie de l'ordre de 127.000 victimes, soit 3% du total des usagers des psychothérapies.


Les "10 commandements" du thérapeute de la mémoire "retrouvée".

Vous trouverez dans notre page spéciale:
- les "10 commandements" du thérapeute de la mémoire "retrouvée".
- les symptômes qui leur permettent de diagnostiquer un abus sexuels intervenu 20 ou 30 ans plus tôt.
- Une liste des abus sexuels, présumés être à l'origine des troubles et symptômes ci-dessus.
Lire ...ici


Le credo des thérapeutes qui font "retrouver" des faux souvenirs

Des études approfondies ont été réalisées aux Etats-Unis pour connaitre les motivations des thérapeutes. Michael Yapko a ainsi interrogé les thérapeutes ayant un diplôme universitaire en psychologie (au-delà du niveau Master) et qui participent aux conventions nationales de psychologie. Les résultats sont édifiants, on comprend mieux alors la mode des thérapies de la mémoire "retrouvée" (TMR)

L'étude de M. Yapko

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Etude de Michael D. Yapko en 1992 aux USA publiée dans le livre: "Suggestion of Abuse True and False Memories of Childhood Sexual Trauma", NY Simon & Schuster, 1994.

Données collectées auprès de plus de 800 psychothérapeutes participant aux conventions nationales de psychologie :
- Age moyen des répondants : 44 ans
- Niveau d’études : au-delà du niveau Master et ayant une expérience clinique de plus de 11 ans

Pourcentage de réponses

 

Je suis d’accord avec l’affirmation suivante

40%

Je crois que des souvenirs précoces, même  ceux des premières années de la vie, son enregistrés avec précision et son récupérables

40%

Si les gens ne se souviennent pas bien de leur enfance, c’est en raison d’évènements traumatiques

60%

Un évènement que quelqu’un ne peut pas se remémorer doit avoir été refoulé.

36%

Si un client croit qu’un souvenir est vrai, je dois aussi croire qu’il est vrai si je veux l’aider

84%

La régression vers le passé par l’hypnose (hypnotic age regression) est une technique utile.

75%

 L’hypnose permet aux gens de se souvenir précisément d’évènements oubliés.

47%

 Les psychothérapeutes peuvent avoir une confiance supérieure  dans les détails d’un évènement traumatique lorsqu’il est obtenu par l’hypnose plutôt que par d’autres méthodes *

31%

Quand quelqu’un a le souvenir d’un traumatisme sous hypnose, celui-ci doit objectivement s’être produit 

28% !!!

L’hypnose peut être utilisée pour retrouver des souvenirs de vies antérieures.

 

16%

Il est impossible d’implanter des faux souvenirs chez un patient 

 

Le livre de N. Spanos

Les mythes associés à l’hypnose sont dénoncé par Nicolas Spanos :Faux souvenirs et désordre de la personnalité multiple, De Boeck Université s.a. 1998, p.21 :

* « Ces croyances culturellement admises au sujet de l’hypnose, sont notoirement démontrées comme erronées.. depuis plus de 30 ans ».


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Les études de D. Poole

Etude nationale de Debra A. Poole et D. Stephen Lindsay  conduite au hasard auprès de psychologues américains du niveau Doctorat et ayant une part substantielle de clients de sexe féminin.

Poole Debra A. and D. Stephen Lindsay
Psychotherapy and Recovery of Memories of Childhood Sexual Abuse: Beliefs, Practices and Experiences (version1), Unpublished paper; 1994.

Debra A. and D. Stephen Lindsay
“Psychotherapy and Recovery of Memories of Childhood Sexual Abuse: US and British Practitioners’ Opinions, Practices and Experiences (version2), Unpublished paper; 1994.

Nombre de répondants : 86

 

 

Pourcentage de réponses

Réponses

76%

Ont utilisé l’une des techniques suivantes pour retrouver des souvenirs :

- régression vers le passé par l’hypnose

- interprétation des rêves

- imagerie guidée

- utilisation de photos  de famille comme indices de la mémoire

- interprétation de symptômes physiques comme souvenirs corporels

60%

Reconnaissent utiliser 2 ou plus de ces techniques

85%

Affirment que certains patients qui avaient nié au départ des souvenirs d’abus sexuels s’en sont souvenus plus tard pendant la thérapie

Quelques thérapeutes ont affirmé que tous leurs patients ont retrouvé des souvenirs

52%

Ont affirmé qu’après la première séance ils étaient à peu près certains qu’ils avaient affaire à un cas de souvenirs refoulés

43%

Ont recommandé à leurs patients de lire « The Courage to Heal »

8%

N’ont jamais eu de jugement rapide concernant l’abus sexuel, les techniques suggestives, et ne considèrent pas   le fait de retrouver des souvenirs comme un objectif thérapeutique important

 

Etude complémentaire de Debra A. Poole et D. Stephen Lindsay en 1994 en reprenant le texte des  questions  pour savoir si toutes les patientes avaient ses souvenirs retrouvés en thérapie, étendue au Royaume Uni.

Nombre de répondants : 56

 

Pourcentage de réponses

Résultats

25%

Le nombre de thérapeutes focalisés sur la mémoire

34%

Des patientes qui avaient nié au départ des abus sexuels s’en sont souvenues plus tard au cours de la thérapie


A voir: Le dossier de la TV australienne sur les thérapeutes et leurs techniques

- La télévision australienne ABC News a diffusé le 5 Avril 2010 une émission remarquable, de 45 minutes, sur les faux souvenirs et les thérapeutes "voyous". Les témoignages de "retractors" (les victimes qui sont revenues sur leurs accusations et ont retrouvé leurs familles) sont nombreux. Le Professeur Ian Hickie de l'Université de Sydney a accordé une interview de 10 minutes à Sarah Ferguson pour l'émission "Over the Edge". Il dit notamment:

"Nous ne permettons pas à des chirurgiens voyous de mettre en place leur activité dans leur garage. Nous ne permettons pas à des médecins malhonnêtes de prescrire des médicaments n’importe comment. De la même manière, nous devons être très clairs : les thérapies psychologiques peuvent faire du mal…."

Les principales scènes et extraits, traduits en français, sont dans notre dossier avec les photos de l'émission.
Voir notre dossier
N.B. Le dossier peut mettre un peu de temps à se charger, patientez quelques instants.


ANNEXE: L'attribution du titre de psychothérapeute

- La loi du 9 Août 2004 qui réglemente la profession de psychothérapeute a enfin son décret d'application, publié le 20 mai 2010.
Un peu d'histoire... Monsieur Bernard Accoyer, médecin et député, a proposé en octobre 2003 à l’Assemblée Nationale un amendement qu’il justifiait en ces termes :

"Des personnes, insuffisamment qualifiées ou non qualifiées, se proclament elles-mêmes « psychothérapeutes ». Elles peuvent faire courir de graves dangers à des patients qui, par définition, sont vulnérables et risquent de voir leur détresse ou leur pathologie aggravée. Elles connaissent parfois des dérives graves. (…) Cette situation constitue un danger réel pour la santé mentale des patients et relève de la santé publique. Il est donc indispensable que les patients puissent être clairement informés sur la compétence et le sérieux de ceux à qui ils se confient. Il convient donc de considérer les psychothérapies comme un véritable traitement. A ce titre, leur prescription et leurs conduites doivent être réservées à des professionnels détenteurs de diplômes universitaires, attestant d’une formation institutionnelle, garantie d’une compétence théorique, pouvant être doublée d’une expérience pratique".

Ce texte se heurta à des oppositions farouches, notamment du puissant lobby des psychanalystes. Cette "guerre des psy" retarda de plus de 6 ans la publication des décrets d'application de la loi du 9 août 2004 destinée à règlementer la profession de psychothérapeute.
Le décret vient enfin d'être publié (20 mai 2010), mais le texte de Bernard Accoyer a été partiellement vidé de sa substance et les psychanalystes auront le droit de revendiquer le titre de psychothérapeutes en étant dispensés partiellement de la formation et du stage pratique prévu.
Le texte du décret prévoit en outre que les formations peuvent avoir lieu en dehors du cadre universitaire et cela ouvre la voie à des instituts privés de formation dont la compétence et le sérieux seront difficiles à évaluer.
lire le décret d'application.
Il est dommage que les victimes des thérapeutes déviants ne soient pas mieux protégées.

Vous pourrez aussi lire sur ce sujet les articles très complets du Professeur Esteve Freixa i Baqué** dans la revue Science... et Pseudosciences :
- L’usage du titre de psychothérapeute au Journal Officiel : la protection des patients, la grande oubliée (SPS N° 291 juillet 2010) ...ici
- Le pouvoir (pas le moins du monde occulte) des psychanalystes (SPS N° 293 décembre 2010) ...ici
** Esteve Freixa i Baqué est professeur d’épistémologie et de sciences du comportement à l’Université de Picardie.

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